DÉPASSONS NOS PEURS


Quelqu'un demanda à Shibli :

"Qui t'a guidé sur la voie?"

Shibli répondit :

"C'est un chien. Un jour, je vis cet animal, presque mort de soif, attendre au bord de l'eau. Chaque fois qu'il se penchait pour boire, il voyait son reflet et reculait, effrayé, pensant qu'il y avait un autre chien. Finalement, torturé par la soif, n'en pouvant plus, faisant fi de sa peur, il sauta dans l'eau... et le reflet disparut.

Il avait découvert que le seul obstacle qui l'empêchait de se désaltérer n'était que lui même et qu'il avait disparut.

De la même façon, le mur auquel je me heurtais disparut à l'instant où je compris ce qu'il était :
ce que je prenais pour moi-même. La voie s'est ouverte devant moi parce que j'ai observé le comportement d'un chien.


                                                                                                         Conte Soufi

Comprenez que vos peurs sont aussi illusoires que le reflet de ce chien dans l'eau, même celle qui paraissent très réelles. Ainsi vous pourrez retrouver votre liberté d'agir.

Un futur observable

En 2068, l'homme a considérablement avancé dans sa connaissance du monde quantique. Il a décodé le fonctionnement de ce mécanisme et peut aujourd'hui, grâce à ce savoir, avoir accès à chaque probabilité de réalisation en posant l'intention d'observer un moment choisi que ce soit du passé ou du futur.

Nous pouvons ainsi, observer à loisir, les conséquences de chacun de nos choix avant qu'ils ne se s'accomplissent vraiment.

Joséphin arriva à bout de souffle vers son père.

• Et bien Joséphin, que t'arrive t il ? On dirait que tu as vu un monstre !
• C'est presque ça, dit Joséphin qui du haut de ses 16 ans contenait difficilement ses larmes.
• Quoi ? Dis moi, tu m'inquiètes !
• Je dois arrêter le vélo, il faut que je trouve une nouvelle activité.
• Mais Joséphin, c'est ta raison de vivre ! Pourquoi veux tu arrêter ? Tu t'es fâché avec ta coach ? C'est Lizlette qui c'est encore moqué de toi ? Ne l'écoute pas, c'est naturel ces taquineries entre frère et sœur.
• Mais non papa, ça n'a rien à voir, j'ai vu mon futur probable, je vais réussir une carrière dans le cyclisme mais tellement éphémère, je vais me blesser papa et je vais devoir arrêter du jour au lendemain, je ne pourrais jamais supporter ça.

Cette fois Joséphin ne put pas retenir le désespoir qu'il essayait désespérément de contenir et laissa éclater son désarroi. Son rêve de toujours venait de partir en fumée en une fraction de seconde. Mathis sentit le rouge lui monter aux joues.

• Joséphin, je t'ai pourtant demandé de ne jamais observer l'intrication de tes choix, tu comprends pourquoi maintenant ! Toutes ces années à t'investir corps et âme dans ta passion pour abandonner aujourd'hui ! Je ne l'accepte pas, tu ne renonceras pas à ton rêve, c'est hors de question !
• Mais papa, je ne pourrais plus m'investir autant en sachant ça !
• Ecoute moi bien attentivement Joséphin, des erreurs dans ma vie j'en ai fait pas mal, pourtant je n'en regrette aucune. N'oublie jamais que derrière chaque épreuve se cache un cadeau. Ta mère par exemple, un des plus beau présent que la vie m'ait offert, j'ai eu le bonheur de sa présence grâce à mes études de commerce qui ce sont pourtant révélées désastreuses. Depuis petit, mon rêve le plus profond a toujours été de vivre de mes peintures, mes parents m'ont toujours découragé en me disant que ce n'était pas un vrai métier et que je ne pourrais pas vivre décemment de ce qui n'était pour eux qu'un passe-temps !
• Oui mais tu y es arrivé !
• Oui c'est là que je veux en venir Joséphin, si j'avais pu voir et donc convaincre mes parents que je serais un peintre reconnu, je n'aurais pas débuté dans le commerce, aujourd'hui je ne serais pas avec ta maman que j'aime tant et tu ne serais pas là à avoir cette discussion avec moi. Sois à l'écoute de ton cœur, pas de ta raison qui, elle, t'évitera certes des embûches mais rendra ta vie insipide et sans surprise. En observant chaque conséquences de tes choix, tu te prives de ton libre-arbitre, de la satisfaction de te surpasser, d'accéder à la résilience. Tu ne pourras jamais ressentir la fierté d'avoir réussi, tu te coupes du sens même de la vie et de l'apprentissage que l'échec t'offre. Tu attaques la racine de la magie qu'est la découverte de qui l'on est vraiment, de notre potentiel enfoui. Tu n'as plus accès à l'excitation d'attendre la récolte de ce que nous avons semé. Quelque soit le trésor que tu découvres, précieux est le chemin qui t'y mène.
• Oui papa, je comprends ce que tu es entrain de me dire, mais comment faire.
• Vis ce que ton cœur te dicte et saches que même si la probabilité de dépasser cet accident est faible, elle existe cependant et que si ton rêve est assez grand pour que tu ne le perdes jamais de vue il a le pouvoir de transformer ce qui semble déterminé. Observe tes peurs, comprends qu'elles ne sont qu'une illusion qui te limite et dépasse les. Je suis fier de l'homme que tu es entrain de devenir et je crois en toi.
• Merci papa, je t'aime.

Mathis et Joséphin s'étreignirent longuement. Le fils ressentit la gratitude d'avoir un papa bienveillant, ses épaules s'allégèrent en ressentant qu'il avait le droit de se tromper, qu'il n'y avait pas un Bon chemin et un Mauvais chemin, il pourrait maintenant se laisser porter par son inspiration. Le papa savait que la chute était inévitable, qu'elle nous permettait de grandir, son rôle était d'élever son fils au sens noble du terme.

Acceptons d'échouer, osons vivre nos rêves sans savoir ou ils vont nous mener. Ne soyons pas paralyser par le regard de l'autre, devenons qui nous sommes !

                                                    Des êtres merveilleux.

Virginie Boissière